Quels sont les effets de la sécheresse sur les abeilles ?

13 Sep 2022 | parole d'apiculteur, Partage d'expérience de nos partenaires

Fabrice Allier est ingénieur de recherche et développement à l’ITSAP (Institut Technique et Scientifique de l’Apiculture et de la Pollinisation), chargé de la thématique d’agroécologie.

Ses axes de travail : trouver des leviers pour diminuer l’exposition des abeilles aux produits phytosanitaires et renforcer les systèmes de cultures en ressources alimentaires pour les abeilles. Il anime notamment le projet FLEUR, qui réunit apiculteurs et arboriculteurs.

Il est membre du comité de labellisation de BEE FRIENDLY depuis l’année dernière !

Quel est ton regard sur cette saison apicole ?

Nous savons que la récolte de miel dépend beaucoup des conditions météorologiques. Et cette année, les apiculteurs ont guetté les meilleures fenêtres météo pour prendre leurs décisions. Ils ont aussi parfois tout simplement subi ! Il est encore tôt pour avoir un avis global, mais voici quelques tendances : Ce printemps, la production de miel semblait aléatoire, mais dans quelques territoires les apiculteurs ont pu tirer leur épingle du jeu. Faisant des miellées correctes (par exemple pour l’acacia, contrairement à l’année dernière).

C’est à partir de mi-juin que la situation se tend, face à l’enchaînement des vagues de chaleurs caniculaires, entrainant une forte sècheresse généralisée des plantes semi-naturelles (bords de champ, jachères, prairies, haies, massifs forestiers) et même de certaines cultures (tournesol, maïs récolté pour son pollen). Les apiculteurs réactifs sur des micro miellées ont sans doute pu récolter quelques kilos…

Espérons que des pluies de septembre relancent la floraison de fin de saison, et donc permettent la constitution des réserves alimentaires dans les ruches, cela relancera les pontes avant l’hiver.

Quels sont les effets de la sécheresse sur les abeilles ?

Les colonies d’abeilles font preuve d’une bonne capacité de résilience face aux aléas climatiques et cette adaptation varie aussi en fonction des races d’abeilles. Mais des vagues de chaleur successives, dépassant régulièrement les 35°C, peut avoir plusieurs effets sur les abeilles.

Premièrement la sécheresse entraine une baisse des ressources alimentaires : moins de fleurs, et pour celles qui survivent, des difficultés à produire du nectar !

Également, pour les abeilles le besoin de réguler la température interne à 35 degrés s’intensifie : des butineuses sont donc « réquisitionnées » pour augmenter la collecte d’eau et ventiler davantage. 

Autre conséquence, il est possible d’observer une baisse de la dynamique de la ponte de la reine : s’il n’y a pas assez de ressources alimentaires, elle réduit sa ponte pour avoir moins de « bouches à nourrir ».

Si à cela s’ajoutent d’autres facteurs de mortalités, tels qu’une infestation varroa mal maîtrisée, une exposition à des produits chimiques ou encore un manque de nourriture, les chances de survie de la colonie au cours de l’hivernage se réduiront.

Quels conseils peux-tu donner aux agriculteurs pour apporter de la ressource aux abeilles avant l’hiver ?

De manière générale, pour les abeilles, l’idéal est que les systèmes de culture puissent produire des ressources en nectar et pollen toute l’année et sur toute l’exploitation.

Spécifiquement pour la fin de saison : 

  • Ne pas négliger toutes les zones de biodiversité autour des parcelles : outre l’apport de ressources florales complémentaires (comme le lierre !), les infrastructures agroécologiques jouent un rôle important pour atténuer les effets brusques de la météo : par exemple la présence d’arbres apporte de l’ombre et fait baisser la température localement, et permet aux insectes de se protéger de la chaleur. La température des sols peut aussi baisser grâce à une bonne couverture

L’automne est la période idéale pour planter les arbres donc n’hésitez pas à vous lancer !

  • Il est encore possible d’effectuer des semis de couverts d’espèces fleuries ou en interculture (jusqu’à mi-septembre), pour une floraison fin octobre : faire les semis après une pluie qui va réhumidifier le sol (même si cette année est compliquée…). Par exemple il faut 45 jours au sarrasin pour fleurir après le semis ! 
  • Au printemps de l’année prochaine, des semis d’espèces fleuries apporteront des ressources alimentaires pour l’été et l’automne selon l’itinéraire technique appliqué : entre les rangs de vigne/vergers, dans des jachères ou en culture : sarrasin, sainfoin, luzerne, mélanges fleuris…
  • Enfin, cet automne, des semis peuvent être réalisés pour une floraison au printemps suivant.

Pour aller plus loin…

Une enquête de la production de miel 2022 est en cours, et sera publiée en fin d’année 


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